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Cryptomonnaies dans le retail, une adoption qui tarde

Cryptomonnaies dans le retail, une adoption qui tarde

Le Salvador a été le premier pays à reconnaitre le Bitcoin comme monnaie légale. C’était il y a un an. Le gouvernement avait fait les choses en grand : un fond de soutien de 150 millions de dollars, un portemonnaie virtuel dédié (« Chivo ») abondé de 30$ pour tous les citoyens, l’obligation pour toutes les entreprises et les commerces d’accepter les paiements en Bitcoin. Bilan un an après : d’après une enquête de la CCI du Salvador, 86% des magasins n’ont jamais effectué de vente en bitcoin, et ce malgré les 4 millions d’acheteurs potentiels, sur les 6 millions d’habitants que compte le pays.

Défiance et volatilité

Les raisons de ce non-succès sont bien évidemment multiples et largement documentées. La première est la défiance envers cette forme de monnaie au fonctionnement jugé obscur pour le citoyen de base. Dans un pays où 40% des habitants ne sont pas « bancarisés », la monnaie papier, celle qu’on peut toucher, qu’on peut compter, qu’on peut glisser sous un matelas, reste incontournable.

L’autre frein souvent évoqué est celui de la volatilité importante de ce Bitcoin. Quand le gouvernement Salvadorien a conçu son programme, celui-ci valait 68000 dollars. A l’occasion de son lancement, il tournait autour de 45000 ; il est aujourd’hui aux alentours des 20000 $, bien loin de la cible initiale. Incidemment, cela veut dire que le portemonnaie électronique du salvadorien a été divisé par deux en pouvoir d’achat depuis son abondement. Ce n’est pas anodin.

Mais le défaut qui pèse actuellement probablement le plus dans l’esprit des consommateurs est la solidité même du procédé et donc la confiance qu’on peut lui accorder. Il ne s’est pas passé une semaine ces derniers mois sans voir tomber sur la place publique une affaire de piratage, une escroquerie de fondateurs partis avec la caisse ou plus récemment la déconfiture d’acteurs leader comme FTX. C’est un singulier paradoxe qui apparait alors : celui de la sécurité économique que ces nouvelles monnaies sont censées procurer et qui n’est pas au rendez-vous. Né de la crise de 2008, le Bitcoin a été promu comme une libération des consommateurs vis-à-vis d’un système financier omnipotent, capable d’entrainer leurs économies dans sa déconfiture. Ce n’est donc pas cette succession des déboires qui vont réconforter les consommateurs hésitants.

Une lumière au bout du tunnel

D’aucuns diront qu’il s’agit là d’un processus normal de maturation d’un marché et de la consolidation d’une technologie qui possède indéniablement de réels atouts. Le simple fait qu’elle ne s’appuie sur aucune structure établie pour fonctionner présente de belles opportunités. La population des « non bancarisés » est souvent ainsi mise en avant. Le Salvador d’ailleurs n’avait pas caché que sa démarche était en partie motivée par le rapatriement facilité de dollars américains issus d’exilés salvadoriens vers leurs proches restés au pays. C’est d’ailleurs la cible bien souvent avancée : l’Afrique par exemple est un territoire qui pourrait devenir leader sur ces transactions. C’est vrai qu’une partie de sa grande population est passée directement à l’utilisation du mobile dans ses activités économiques. Il est alors plus probable qu’on puisse payer un jour en Bitcoin sur un marché de Ouagadougou que sur un marché de Périgueux.

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