DigitalMag

Cryptomonnaies et e-commerce, une union pas si certaine

Cryptomonnaies et e-commerce, une union pas si certaine

C’est sûr, les cryptomonnaies ont aujourd’hui investi le domaine public. Pas toujours avec une bonne image, avec les frasques boursières récentes de la première et la plus emblématique d’entre elles, le Bitcoin, mais le message est compris par tous : nous avons maintenant à disposition de nouveaux moyens de paiement, sûrs et infalsifiables et libres de toute dépendance aux banques. Dans le même mouvement, l’offre de services et logiciels dédiés se multiplient : porte-monnaie électroniques (offline comme online), plugins dédiés dans la plupart des plateforme e-commerce (Magento, Prestashop…), services de trading, etc. Bref, toute la panoplie est prête pour s’attendre à un déferlement de ces cryptomonnaies dans nos e-boutiques. Pourtant le marché ne semble pas se mettre en mouvement. Car si de nombreux sites d’e-commerce affichent accepter le Bitcoin, la plupart des poids lourds de la distribution en ligne en restent à l’écart. Essayez de payer en Bitcoin sur la Fnac, Amazon ou Cdiscount : vous n’y arriverez pas… Comme Dell, qui affiche sur son site que, après l’avoir accepté un temps, il abandonnait les paiements dans cette monnaie, invoquant leur trop faible volume.

Les défauts de ses qualités

Le bitcoin, s’il l’on s’arrête à cette cryptomonnaie, c’est finalement pour le commun des mortels un nom sans véritable visage. Et c’est sa nature même : il n’appartient à personne puisqu’aucune autorité ne le gère. Côté grand public, c’est déjà sa première cause probable de suspicion, éveillant de nombreuses interrogations : quelle est ma garantie si je ne peux me retourner vers personne en cas de litige ? N’y-a-t-il vraiment personne derrière ce procédé ? Où puis-je l’acheter ? etc… Côté commerçants, outre de réveiller les mêmes réticences, on est plus porté sur la liquidité et la facilité de recel de ces monnaies. Il ne faut pas oublier en effet que quand un e-commerçant accepte des paiements en Dollars, il n’aura pas à se préoccuper de la conversion en Euros : sa banque le fera pour lui, négociant sur le marché des changes pour son compte, moyennant commissions bien sûr, mais ça restera une pratique simple pour lui. Sur un marché non organisé – ie : sans véritable bourse ni régulateur – le détenteur de Bitcoin se retrouve seul à devoir trader ses Bitcoins acquis. Ce n’est pas sans conséquences sur ses choix : le fossé existant entre accepter un paiement Carte Bancaire et un paiement Bitcoin reste dissuasif sous cet angle. On peut y ajouter un défaut endogène au concept : l’absence d’entité mère invite n’importe quel informaticien au fait des algorithmes fondateurs, à créer sa propre monnaie. On dénombrerait ainsi plus de 1500 cryptomonnaies, bien plus que les monnaies papiers en circulation, largement de quoi donner le tournis… On l’a vu par ailleurs, l’absence de régulateur, amortisseur d’excès, rend le marché hiératique : l’année dernière le Bitcoin s’affichait à 16000 € environ dans ses plus hauts. Il est côté à l’heure où est écrit ce papier à 5500 €, allez gérer un business model solide avec ces marchés agités…

Résilience de la monnaie papier

L’an dernier, ce sont 129 milliards de nouveaux billets qui ont été émis en France par la Banque de France, soit une hausse de 7,6% en un an, bien plus que le taux de croissance du PIB. On comprend donc qu’une partie de ces billets ne rentrent pas dans le circuit de consommation et sont simplement stockés par leurs détenteurs. La même étude confirme que 25% des européens conserveraient de l’argent liquide chez eux. Il faut y déceler qu’à notre époque, où tout où est tracé, de votre achat de couches-culottes à la géolocalisation du dernier restaurant que vous avez fréquenté, les paiements en espèces représentent l’ultime espace de liberté individuelle, à l’abri de toute surveillance. Du coup, un e-commerçant aurait plus intérêt à réintégrer dans ses moyens de paiement l’ancestrale « contre-remboursement », hérité de la VPC, que le Bitcoin, histoire de mettre la main sur ces magots planqués sous les matelas…

Cet article vous a plu ? partagez-le :

Abonnement à la formule intégrale !

Le magazine Édition digitale sur ordinateur, mobile et tablette
Je m'abonne
Abonnement